Tado est une petite localité située au sud-est du Togo, à la frontière du Bénin et à 15 km de Tohoun. Composée de quatre grands quartiers dont Adjatsè, Domé, Alou et Apetougbé, Tado est l’origine ancestrale des peuples Aja qui regroupe les Fon, les Ewé ou Dogbo, les Anlon, les Xla, les Ayizo, les Eza, les Alu, les Houénon, les Neglokpé, les Saxwé et les Gun. Descendant de ces peuples, l’actuel roi de Lokossa, Totoh Gnanwoh IV mentionne que Togbui-Anyi était le fondateur du royaume de Tado.
Gaston Koovi Bossou
Refondée en l’an 1000 par les Ajas, Tado était le premier royaume, le plus puissant du sud du Togo actuel. Il prospéra culturellement jusqu’au XIXème siècle. Dans son âge d’or, qu’on peut situer entre le XVe et le XVII e siècle, le royaume Aja de Tado s’apparentait à une confédération couvrant un espace allant de la Volta au Kouffo jusqu’à Gbadagli (frontière nigérianne) et de la mer à Agbonou (Atakpamé) et à Kambolé (Tchamba). Interrogé sur l’origine de ce royaume, l’actuel roi de Lokossa, Totoh Gnanwoh IV confie que Tado est le berceau des Adja-Ewé. C’était une ethnie qui peuplait le Sud du Togo et du Bénin. « Autrefois, le village s’appelait « Ezamè ». En langue Adja, Eza est le nom d’un arbre. Ainsi, Ezame veut dire « implanté dans les arbres Eza ». A ce moment de son histoire, le village souffrait de plusieurs maladies. Il y avait des morts infantiles, la sécheresse et la famine. Cela coïncida avec l’arrivée d’un homme nommé Togbui-Anyi. Ce dernier proposa de guérir la population, à condition qu’on l’accepte comme roi. Par ses pouvoirs magiques, l’étranger guérit le village de tous ses maux et devint le roi », explique le descendant.
Ainsi, poursuit-il, il changea le nom du village, en Tado, ce qui signifie : enjamber. « Selon ce roi, tous les malheurs vont enjamber le royaume. Chaque année, les Adja de Tado fêtent cette délivrance dans le courant du mois d’Août. Au cours de cette fête, les Adja-Ewé du Togo, du Bénin et du Ghana reviennent au bercail pour prier les mânes de leurs ancêtres afin d’avoir des pluies et une bonne santé », ajoute l’occupant du trône. Ce dernier organisa alors les cérémonies de purification du village Azamé. C’est au cours de l’exorcisation des esprits qui nuisaient le village qu’il prononça la formule cabalistique qui contient l’expression “ata ado mi”, c’est à dire “elle nous enjambera”. C’est à partir de ce jour que tout le village est épargné de toute calamité. En effet, Tado est le fer de lance des autres royaumes comme Agbomey, Notsé, Allada, Porto Novo. Ce sont les princes de Tado qui ont fondé ces royaumes. Pour le roi de Lokossa, Tado est une ville qui est aujourd’hui oubliée par les autorités togolaises. Il regrette que cette ville ancestrale soit tombée en ruines. Cependant, il se réjouit de ce qu’elle vit en septembre, le moment des retrouvailles en mémoire du puissant roi Togbui Anyi, le fondateur du royaume. « Ces retrouvailles entre les fils et filles du peuple Aja venus de tous les horizons, représentent pour d’autres, un pèlerinage », déclare-t-il. Il déduit que tous ces peuples se réclament de Tado et constituent ce qu’il est convenu d’appeler aujourd’hui l’aire culturelle Ajatado.
Les peuples de Tado
Dans son récit, le roi de Lokossa, Totoh Gnanwoh IV mentionne que c’est entre le XIVe et le XVe siècle que le groupe des Ewé quitta la cité de Tado en direction de l’ouest pour des causes non élucidées. « Il semblerait qu’à la suite de crimes commis par certains vieillards, une violente colère de la part de Anyi Gbãfio avait été soulevée. Conduits par un vieux chasseur nommé Afotsè, ils traversèrent le Mono et s’installèrent à Tako, lieu de la première implantation », indique-t-il. Puis d’autres groupes arrivèrent et constituèrent ainsi les autres quartiers de cette nouvelle ville. Les Ayizo sont partis de Tado sous le règne du roi Aja-Dasa et se sont répandus entre le Couffo et le Wemé autour de leur capitale Davie-Ali. « Les Neglokpé, c’est le clan de forgerons qui se sont installés dans la région de Afãnyã. Les Hwe ou Hweno – Ils ont également quitté Tado sous le règne du successeur de Togbui-Anyi, le roi Aja-Fufulili sous la conduite du frère du roi, Zonu. Ils s’établissent entre le Couffo et le Mono autour des deux centres qui sont Hwegame et Ajahome. Ils sont d’excellents agriculteurs et vont contribuer à répandre l’influence de Tado dans cette région », raconte le roi de Lokossa. Quant aux Xwla et les Xweda, ils sont issus d’un même groupe qui a quitté Tado sous le règne du roi Aja-Ho. Ils s’établirent entre le Mono et le lac Nokwe. Les Xweda s’établirent autour du lac Ahémé à Guézin, puis s’étendirent vers Saxé et Glēxwé (Ouidah) qui fut fondé par Kpase, le 2ème roi de Saxé. Les Xwla, eux, s’établirent à l’embouchure du Mono sous la conduite de leur ancêtre Avlekpon. Ils créèrent deux villes, Adamé et Agbanakin, sur les bords du Mono, puis Xwalagâ Grand Popo. Pour le souverain de Lokossa, ces peuples investissent le village Ayiz qui deviendra Allada.
Ils s’établirent dans la région jusqu’à ce que des querelles autour du trône d’Allada, entre les fils du 2ème roi, Kokpon ou Lansouhoutô, les séparent. L’aîné, Té-Agbanlin, insiste-t-il, se retourna vers Hɔgbonu ou Ajacɛ puis fonda par ruse le royaume de Porto-Novo. Le cadet, Dako, accompagné de son autre frère, s’imposèrent par ruse à Abomey, puis Aho, surnommé Houégbadja instaura le royaume de Dahomey qui reviendra conquérir Allada sous Agadja.